samedi 22 septembre 2012

Balenciaga au Pays de Sapho


Balenciaga et l’univers de la publicité c’est un peu une histoire médiatique à la « Je t’aime, moi non plus » qui m’a toujours beaucoup amusé. Naviguant d’une rive à l’autre du dangereux fleuve de la Communication, alternant entre Star Strat’ parfois étonnante et discrétion quasi monacale d’un Directeur Artistique phobique de l’univers de la presse, Balenciaga, propose au fil des saisons sa vision de la femme. Tantôt futuriste et robotique, tantôt déprimée ou carrément lascive, elle devient pour la précollection 2013, dévoilée sur la toile il y a quelques jours, épanouie et heureuse en proie à une crise aigue de plaisir Saphique.
Mais comment en est-on arrivé là ? Quel coup de baguette magique Nicolas Ghesquière a-t-il donné à la femme Balenciaga pour la libérer en moins d’une collection de son carcan stylistique, libérant son corps de ses habituels néoprènes pour l’habiller d’une légèreté floue et sensuelle ? C’est à cette question sensible que nous allons nous intéresser, étudiant saison après saison, campagne publicitaire après campagne publicitaire, tel le rattrapage du roman photo de l’été que nous n’avons pas encore lu, l’évolution de la dite Femme Balenciaga !

Flashback

Hiver 2008

Tout commence à l’automne-hiver 2008, lorsque Balenciaga, inaugurant fièrement la toute nouvelle boutique de Los Angeles, décide de sortir de sa torpeur médiatique et de frapper un grand coup en se choisissant une égérie incarnant une certaine vision de l’élégance à la française en la personne de l’actrice et chanteuse Charlotte Gainsbourg. Cheveux plaqués et brillants, poses volontairement figées presque déshumanisées aux accents robotiques, Charlotte Gainsbourg, sous l’œil aiguisé du photographe David Sims se meut en icône mode forte et ultra féminine et incarne une certaine vision de la Couture 2.0, alliant précision des coupes, modernité et contraste des matières.

© Balenciaga AH/08
© Balenciaga AH/08

Eté 2009

Suite au premier coup de maître de David Sims, Balenciaga réitère sa collaboration avec le photographe Britannique, et impose un style résolument futuriste pour la femme Balenciaga. Cheveux tirés, tenues structurées, décor énigmatique, presque Lynchien – « Mulholland Drive » n’est pas loin. Pari réussit, Balenciaga définit les grandes lignes de sa communication – avant-gardiste, arty et à contre-courant.

© Balenciaga PE/09
© Balenciaga PE/09

Hiver 2009

Immense fracas, bruit de meubles renversés dans les coulisses feutrées de la discrète maison Balenciaga et grands changements en matière de communication. Le talentueux David Sims et remplacé par le photographe de mode Steven Meisel à l’univers sans doute moins asexué que celle de son prédécesseur. Au revoir Mlle Gainsbourg, et bonjour à l’actrice américaine Girl Next Door Jennifer Connely, qui devient ainsi le temps d’une saison l’égérie peu conventionnelle et très lascive d’une maison de couture parisienne peu connue pour son coté grivois… Désordre organisé, corps renversé, chevelure ébouriffée, jambes hautement relevées et même croupe fièrement tendue… Chocking ! La femme Balenciaga s’encanaille, faisant fit du robotique passé, comprenant que dans une certaine sexualité débridée repose peut-être son salut !

© Balenciaga AH/09
© Balenciaga AH/09
© Balenciaga AH/09

Eté 2010

Finit les caprices aux accents érotiques de Miss Connely, la très parisienne et très discrète Charlotte Gainsbourg est de retour pour incarner le tout nouveau Parfum Balenciaga. Fraîche, discrète, fragile mais confiante, la nouvelle femme Balenciaga n’a cependant pas oubliée les leçons de sa cadette américaine ; posant sagement au bord de l’eau, elle laisse sa robe en néoprène en cabine d’essayage et ressort légèrement vêtue d’une simple combinaison en satin et dentelle noire dévoilant quelques centimètres de chair de plus. Le sage Eros a sans doute un parfum, celui de la poudre ancienne et de la violette tout comme les notes de fond du nouveau jus Balenciaga !...

© Balenciaga PE/10


Hiver 2010

Un pas en avant, un pas en arrière… la femme Balenciaga doute. Liberté sexuelle débridée comme sa consœur Américaine ou sage retenue ? La réponse pour l’hiver 2010 se trouve sans doute quelque part au milieu. Nicolas Ghesquière, par le biais du photographe Steve Meisel, (dés)habille les mannequins Mirte Maas, Kirsi Pyrhonen et la très belle Stella Tennant, de robes en soie gauffrée, plissée, structurée aux tonalités rouge orangées et aux longueurs pour le moins estivales. Incroyables souliers nous rappelant telle une petite madeleine de Proust les Légo de notre enfance, imprimés arty, et fond ocre presque inquiétant, l’honneur de la femme Balenciaga est sauf ! Mais, chevrotante, grelottante et sans doute quelque peu déroutée, la femme Balenciaga a froid !

© Balenciaga AH/10

Printemps été 2012

Ellipse temporelle de plusieurs saisons, nous retrouvons la femme Balenciaga shootée par Steven Meisel (et oui, toujours) au Printemps-été 2012 totalement défaite, au bord de l’hystérie et de la dépression nerveuse ! Décor chaotique d’un appartement ou tout est à la renverse, volumes minimalistes de son intérieur nous faisant nous demander ce qu’il est advenu de son élégant appartement Haussmannien ou de sa résidence secondaire à Los Angeles et nous rappelant indéniablement la crise du logement à Paris. Le cheveu sale et désordonné, la capeline de travers, entourée des factures impayées de sa carte de paiement du Bon Marché Rive Gauche, rien ne va plus, la femme Balenciaga est définitivement au bout du rouleau !

© Balenciaga PE/12
© Balenciaga PE/12

Dépression post électorale ou bien effet de la crise économique mondiale qui lui fait craindre une irrémédiable récession du monde Occidentale sans cesse rabâchée par les Médias qu’elle regarde à présent comme une folle ?

© Balenciaga PE/12
Ou bien la femme Balenciaga n’en peut-elle plus de ces vestes trop grandes pour elle qu’elle doit porter, de ces jupes aux longueurs Mormones qui lui tassent la silhouette et de ces shorts en néoprène à taille haute qui la cisaille à longueur de journée ?

© Balenciaga PE/12
© Balenciaga PE/12

Non ! La femme Balenciaga est en pleine crise d’identité et ne comprend pas le choix de sa nouvelle égérie qui incarnera dans les prochaines semaines le parfum FloraBotanica – Kristen Stewart !

© Balenciaga PE/12
Pensez donc ! Une vampire sortit du ruisseau ! Une actrice américaine ayant toujours prônée l’anti-mode et ne portant jamais de parfum comme égérie du nouveau jus de sa chère Maison !... Quelle hérésie ! Kristen Stewart,  puisqu’il s’agit d’elle, femme bionique au cou distortionné (et sans doute photoshopée plus que de raison), héroïne de toute une génération d’adolescente en mal de sentimentalisme nocturne à l’eau de rose, presque aussi grande que le flacon de parfum qu’elle est censée incarnée, portant une robe en soie imprimée sur néoprène d’une collection (passé)antérieure est l’improbable égérie d’une campagne de Star Stratégie aux ficelles si peu discrètes et qui est Ô combien éloignée des valeurs d’une maison puisant ses racines dans le raffinement Madrilène et le Constructivisme et la Recherche vestimentaire.

© Balenciaga FloraBotanica
No Comment ! Silencieuse, la femme Balenciaga souffre.

© Balenciaga PE/12

Hiver 2012

Pour se remettre de son mal-être stylistique, la femme Balenciaga décide de quitter Paris pour un temps et prend ses quartiers d’hiver dans sa maison de Guétary loin de la frénésie de la capitale, soucieuse d’oublier l’affront Stewart ! Dunes de sables, ciel orageux (en référence au film Take Shelter), air marin et embruns lui font le plus grand bien ! 

© Balenciaga AH/12
Le cheveux libre, l’œil hagard, assise, face à la mer, la femme Balenciaga en oublierait presque ses rudiments de Mode, et piquant dans le coffre de vêtement qu’elle avait gardée depuis son adolescence, elle porte sans se soucier des associations parfois hasardeuses qu’elle fait, les pantalons taille haute élastiquées de sa maman (c’est la mode cette saison croit-elle avoir lu dans le Marie-Claire 1988 qui traînait sur la table basse du salon), ses sweat-shirts Star Wars qu’elle portait déjà Over Size adolescente pour cacher ses formes naissantes (précurseuse la Femme Balenciaga vous dit-on !) ainsi qu’une paire de gant (il fait frais parfois en bord de mer en cette fin de saison) qu’elle croyait avoir perdue et qu’elle aurait sans doute due… Break stylistique indispensable pour se remettre d’aplomb et attaquer 2013 sous les meilleurs augures !

© Balenciaga AH/12
© Balenciaga AH/12

Printemps-Eté 2013

Et quelle agréable surprise ! La femme Balenciaga revient rayonnante, reposée et épanouie de son séjour en bord de mer ! Ayant compris que le néoprène était définitivement Out pour la prochaine saison, brûlant ses imprimés StarWarsiens, la femme Balenciaga glisse son corps nu dans de délicats jerseys de soie et de légères mousselines pastel. Inspirée de la version contemporaine de Malcolm McLaren de l’opéra « Madame Butterfly », la vidéo Balenciaga Resort 2013 est une ôde à la féminité, à la douceur, mais aussi  aux plaisirs saphiques…

© Balenciaga PréCollection/13
© Balenciaga PréCollection/13

En effet,  loin de s’être ennuyé l’hiver durant, la femme Balenciaga est revenue de son séjour Landais entourée de nouvelles amies ! Proches ! Très proches !..

© Balenciaga PréCollection/13
Défilant lentement dans un décor minéral quasi irréel, ses nouvelles compagnes, langoureusement étendues sur de blocs de pierre à la blancheur toute virginale, se suivent, s’effleurent, se touchent et se caressent… Ignorant l’opprobre populaire face au revirement de son orientation sexuelle, telle une délicate sylphide d’un temps nouveau, la femme Balenciaga, libérée de son carcan se sent libre. Libre de son corps, libre de ses mouvements, libre de ses vêtements, elle déambule vêtue de jolies vestes fluides à la carrure soulignée, de jupes de patineuse à godets, et de shorts aussi courts qu’une belle journée de printemps.

© Balenciaga PréCollection/13



Heureuse, libre et épanouie, enfin, la femme Balenciaga, après de nombreuses hésitations stylistiques, de nombreux doutes et de multiples questionnements semble enfin avoir trouvée sa voie,  celle de la douceur du pays de Sapho !

A.

samedi 8 septembre 2012

In Pop We Trust - ATLD


A three legged dogATLD – nom étonnant pour une toute aussi étonnante griffe de foulards dont nous sommes récemment tombés sous le charme. Et c’est par une belle après-midi de fin d’été, flânant dans les rues du Marais pour un shooting en nature morte improvisé, de l’élégant Parc Royal aux vertes pelouses de la Place des Vosges, que Romain et Issalaye, ses deux jeunes co-fondateurs, nous ont fait découvrir leur concept alliant mode, pop musique et références artistiques multiples. Membres à part entière de cette nouvelle génération très touche-à-tout des /// que j’aime tant, Romain, aux commandes du style et Issalaye, en charge de l’aspect plus commercial, amis d’enfance, issus tous deux de formations et de parcours professionnels différents se sont retrouvés autour de leurs passions communes – la musique et la mode.

© Les Garçons aux Foulards
© Les Garçons aux Foulards

Accessoire masculin et féminin fétiche à l’élégance intemporel, un brin sophistiqué, le foulard est sorti depuis quelques années de ses codes conventionnels pour investir la rue. A three legged dog est représentatif de ce nouveau mouvement de marque de mode, sortant des sentiers battus, au style impertinent et anti-conformiste. Anti-conformiste, tout comme le choix de leur nom, littéralement Un chien à 3 pattes, prenant volontairement le contre-pied des grandes maisons spécialisées dans la Soie mettant toujours en valeurs dans leurs représentations et leurs iconographies des animaux à la noblesse emblématique, alternant Cheval et Art Equestre pour certains et Lion et Chaînes Or pour les autres. Loin de ces clichés stylistiques, ATLD prône la culture de la différence, en tant que force et énergie créative.

© A three legged dog
© A three legged dog
 

Couleurs chatoyantes, imprimés pop et graphiques, ATLD joue la carte du Fun tout en conservant la qualité d’une fabrication artisanale 100% Made in France. Réalisée en édition très limitée et produite dans des ateliers artisanaux de soieries de la vallée Lyonnaise, tout, du packaging aux incroyables carrés en Twill de Soie roulottés main, est réalisé, pensé et volontairement conçu en France afin de préserver la tradition et l’héritage de l’une des activités de confection française les plus prestigieuses et les plus ancienne.

© A three legged dog
© Les Garçons aux Foulards


In Pop we Trust

Pour leur Collection 0 présentée officiellement en amont de la Fashion Week Parisienne, ATLD rend hommage à la pop culture, éphémère et industrielle. En brandissant sur des carrés de soie des portraits emblématiques de personnages controversés mais adulés par des générations, d’Amy Winehouse à Mickael Jackson en passant par Beth Ditto et Kanye West (mon preferé), A Three Legged Dog tranche dans le vif en se jouant des couleurs pour capter de ces étoiles filantes une image intemporelle. Pure montée d'ego trip ou étendard d'une génération de rebelles sans causes, " In Pop we trust ", au delà d'orner des étoffes, questionne et interpelle en une parfaite symbiose artistique.

© Les Garçons aux Foulards

« Au delà de leur personne, c'est leur image qui nous intéresse. Détestés, adorés, ils restent de véritables idoles. Nous avons travaillé les visuels "In pop we trust" dans l'esprit du one dollar bill. La démarche directement inspirée du pop-art vise à détourner l'industrie pour proposer un étendard de l’éphémère. Vide de sens ou sens du vide. »

© A three legged dog
© A three legged dog

Au croisement de diverses influences telles que le pop art de Andy Warhol, l'acrylique de Kaws, l'univers psychédélique du graphiste japonais Yokoo, ou encore la numismatie, cette première collection élargit non sans humour les contours de l'artisanat français avec comme idée complémentaire celle de tenter de refléter une époque, un cliché photographique sociétal.

© Les Garçons aux Foulards

Délicieusement décalée et impertinente, aux frontières d’un savoir faire textile français hérité et reconnu dans le monde entier et des images neo pop art les plus actuelles, cette première collection A three legged dog donne le ton d’un style nouveau mettant à l’honneur le foulard en tant qu’accessoire phare d’une jeune génération créative et hors norme et nous fait littéralement craquer pour ses illustrations exclusives au style délicieusement Pop Acidulé – on adore !

© A three legged dog

In Pop we Trust – ATLD – 199 euros

A shopper en exclusivité en ligne sur


A.