samedi 22 février 2014

Jeremy Scott X Moschino



S’il est une collection que nous attendions depuis longtemps, c’est bien celle du très américain créateur Jeremy Scott, pour la très italienne maison Moschino. Il y a quelques mois l’annonce de cette nouvelle collaboration avait fait l’effet d’une petite bombe et avait électrisé la sphère mode, chacun y allant de son commentaire sur l’originalité, la créativité, voir la folie des collections à venir. Deux univers que certains pouvaient juger diamétralement opposés, deux visions de la mode, du style, que rien de prime abord ne semblait relier ; à moins que…  Jeudi 20 février, très belle journée de Fashion Week Milanaise, choisit pour faire défiler cette première colab’ aux airs de cool’ab ! Elégance classique et codes maisons twistés de références aux années 90, ou encore Pop Culture très forte que Franco Moschino, fondateur en 1983 de la maison éponyme, n’aurait pas renié. Car dès ses prémisses, Moschino fit figure d'ovni dans le monde de la mode. Décalé, le créateur s'inspira du surréalisme et du Pop Art pour réaliser des vêtements qui se jouaient, avec ironie, des codes traditionnels de la couture par des détails détournés de leur fonction première et un imaginaire stylistique coloré mettant au cœur des créations l’humour et une certaine forme d’autodérision. Le succès fut immédiat et la maison ne cessa de se développer et de multiplier les lignes durant une décennie jusqu’au décès subit de son créateur en 1994. Depuis, des stylistes tels que Vincent Darré ou encore Rosella Jardini, la plus proche collaboratrice du couturier défunt, se sont succédés pour réinterpréter l’ADN de la maison. Jeremy Scott, nouveau directeur artistique des lignes Moschino et Moschino Cheap&Chic a gagné le pari délicat de signer une première collection vitaminé, exubérante, riche et pop ! La preuve en image.


© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15


Codes maison

Blouses en soie à lavallière, tailleurs sages à cols ronds et jupes longueurs genoux, profusion de chaînes Gold, bijoux XL et matelassé, tous les codes d’une certaine vision « Chanelisante » du style (dont Franco Moschino détournera toujours les codes bourgeois), cuir noir un peu mauvais genre, mais aussi rouge intense, gold et imprimé vache que le fondateur de la maison osa faire franchir le seuil des podiums, tous les grands classiques de la griffe italienne sont présent. Traités de façon littérale pour certains, ou twistés avec une touche d’humour autour de la thématique de la fast consommation, dont le rythme effraîné et saisonnier de la mode fait sans nul doute penser. 

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15

1983, 1994, 2002 ou 2014, le style indémodable et inimitable Moschino transparait de chaque silhouette faisant des clins d’œil aux créations du maître italien. Et quand enfin le créateur new-yorkais s’attaque à l’un des emblèmes de Moschino, la ceinture à lettre mouvante XL Gold (tant de fois copiée depuis), celle ci, loin de ne souligner que les tailles des différentes silhouettes du show, se transforme en cuissardes (souliers indispensable de l’hiver prochain qui ont arpentés tous les podiums de New York à Londres en passant par Milan) hautes ultra rock n’ roll ou en robe de cuir noir entièrement réalisée en trompe l’œil de ceinture noire, aux accents bondage et 80’s.

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15

90’s revival

Revisitant près de 30 ans de création de la maison italienne, Jeremy Scott met à l’honneur dans une large partie de la collection hiver 2014/15 la tendance 90’s. Revival d’une décennie qui a marquée plusieurs générations de ses volumes XL et des ses gammes de couleurs bleach, les années 90 envahissent les podiums mais aussi les garde-robes des Fashion Addict du monde entier.  De cette période, le créateur en reprenant certains des codes les plus emblématiques : denim en total look, bleu « bleaché », micro bombers XL, ou encore casquettes et superposition de bijoux bling. Nous conservons tous en mémoire ces images sur papier glacé, d’une Claudia Schiffer, égérie de la maison de la rue Cambon, photographiée par Karl Lagerfeld, en total look de denim, qui avait dépoussiéré et fait rentrer Chanel dans une nouvelle ère. Jeremy Scott s’inspire sans doute de cette énergie solaire d’une silhouette qui criait sa modernité et sa soif de liberté. 

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15

Soif de liberté que la femme Moschino revendique dès les débuts de la griffe, faisant fi des codes bourgeois conservateurs. 2014, l’esprit rebelle est toujours là est s’inscrit dans une esprit Gangsta Chic, « Homies » des Beaux Quartiers ou les élégantes clientes font partie du clan Moschino, arborant fièrement les attributs gold d’un gang néo bling auquel nous avons tous envie d’appartenir. Nul doute que les nouvelles princesses du RnB américain succombent rapidement pour les créations Gangsta Pop signées Moschino par Jeremy Scott

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15

Pop Culture

S’il est sans doute un lien frappant entre le styliste New-Yorkais et le fondateur de la maison italienne, c’est sans doute la réflexion sur l’univers de monde dans son aspect sociétal, ses rapports aux signifiants, aux images véhiculées par les campagnes publicitaires, mais aussi une réflexion face à notre mode de consommation et sans doute la frénésie de l’acte d’achat comparable à celui des Fast Food, aussitôt achetés, aussitôt consommés, aussitôt jetés.  Transformant certains codes Moschino telle que l’association du rouge vif et du jaune or, repris des tailleurs classiques, gansés de chaînettes, mixés au signifiant de la lettre M, Moschino se transforme en  néo Mac Donald de la mode. Les sacs en cuirs ou plexiglas reprennent avec beaucoup d’humour les formes des Happy Meal et autres box du géant américain de l’agro-alimentaire. Coup de cœur pour le sac matelassé rouge porté sur un plateau tel un objet précieux à consommer sans modération. 

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
Autre invité de la Néo Pop Culture Américaine, Bob L’Éponge, dont le modèle de robe en maille a déjà fait le tour de la toile en quelques heures après le défilé.

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15

Enfin, final du show, plusieurs looks « Soirs », robes longues, modèles sirènes, bustiers, travail de nœuds et de plissés, le tout revisité à coup d’imprimés « Paquet de Céréale » et « Chips » terriblement décalés.

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15
© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15


Coup de bluff ou coup de maître, les avis sont bien évidemment mitigés sur la toile concernant ce premier défilé de Jeremy Scott pour Moschino, et la partie la plus importante, comme souvent, sera l’accueil des collections par les acheteurs et les clients du monde entier. Pour ma part, je suis en tout cas certain que le créateur New-Yorkais a remplit sa mission, à savoir redonner un grand coup de jeune à la marque Milanaise en retravaillant les codes qui l’ont rendu célèbre, avec humour et autodérision. Et une petite intuition me dit que l’on a pas finit d’entendre parler de Moschino à l’avenir, les stars de l’Entertainment américain s’arrachant les looks fort et désirable signés Jeremy Scott.


A.

© Les Garçons aux Foulards - Moschino FW14/15

mardi 18 février 2014

Jeu Concours - Il était une fois la Rose Noire Seidensticker



Les Garçons aux Foulards vous invitent cette semaine à faire un petit voyage. Un voyage qui débutera de l’autre côté du Rhin, passant par le soleil méditerranéen pour vous conduire enfin au cœur de la capitale. Pour vous tenir compagnie, un emblème, une élégante rose noire brodée appelée Seidensticker !

© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker


Reconnu mondialement comme l’un des leaders de la très belle chemise masculine Made in Germany, la griffe centenaire, originaire de Bielefeld ouvre enfin une maison à Paris, dans le très élégant quartier de Saint Germain des Près. Mais avant de vous en dire d’avantage, installons le décor pour une traversée dans le temps pour mieux explorer l’univers riche Seidensticker !

© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker 
© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker
© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker

Début du siècle précédant, Bielefeld, ville du nord-ouest de l’Allemagne, Walter Seidensticker, 23 ans et 5 000 Marks en poche, fonde sa manufacture de chemises et va en quelques décennies révolutionner le vestiaire masculin ! Un été, en France, lors d’une balade dans le petit port de Sète, le Walter Seidensticker tombe sur une nouvelle dans le journal local qui le fait voyager encore plus que l’escapade pittoresque qu’il était en train de vivre. Au cours de la rénovation d’un bâtiment, on venait de retrouver dans le grenier de celui-ci, une petite boite contenant une rose noire soigneusement enveloppée. A côté, se trouvait un manuscrit médiéval rédigé en latin. Il racontait la légende de cette rose noire. Au XIIIe siècle, un marchand arabe l’avait offerte à un certain Bertrand de Châteaurenard, un croisé occidental. Il était écrit que quiconque possèderait une telle rose entre les mains serait chanceux pour toujours. Très vite, la prophétie s’avéra exacte. Lorsque les croisés furent assaillis par les Sarrasins, tous furent exécutés sauf Bertrand de Châteaurenard. Une rose comme porte-bonheur ? Il n’en fallait pas plus pour conquérir le cœur de l’entrepreneur et ajouter à ses créations une dimension poétique. Il décida d’en faire son emblème.

© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker

Ainsi naquit dans les années 60 la fameuse « Schwarze Rose », devenant la signature de la maison, brodée sur chaque pièce sortant des ateliers allemands. Et, une fois encore, la superstition se révèlera juste. Après quasiment un siècle de tradition et d’innovation, et trois générations de Seidensticker, la chemise à la Rose Noire est plus que jamais vivante, séduisant de plus en plus d’hommes, figurant même dans le Top 3 des plus importants shirtmakers au monde et occupant même la première place Européenne (produisant notamment pour certains des « chemisiers » les plus réputés) !

© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker

Mais la vraie révolution remonte aux années 50. Riche d’un savoir-faire mêlé à un esprit d’innovation, Seidensticker a eu la brillante idée d’inventer des chemises qui ne se repassaient pas ! Mélangeant le coton au diolen, une fibre polyester ultra résistante, les chemises deviennent « easy care ». Résultat : un coton souple, infroissable, et une vraie tenue sans repassage qui n’a cessé de conquérir le cœur d’une clientèle exigeante. Pour cela, une seule recommandation, celle de nettoyer ses chemises en machines avec un essorage très doux.

Questions finitions, les chemises brodées d’une Rose Noire s’adressent à des hommes à l’élégance intemporelle, attentifs aux nouvelles tendances, mais sachant que le style est avant tout une question de coupe, de proportions et de finitions. Déclinée en trois lignes les collections Seidensticker se caractérisent par une coupe et un style propre. La Uno Super Slim, entrée de gamme de la maison offre un fitting très ajusté en coton stretch, pour un client plus jeune et plus mode (à partir de 69€). La Rose Noire esprit city ou casual chic, aux coupes ajustées est le grand classique de la maison mondialement reconnu (de 89€ et 109€). La Rose Noire Tailored, plus premium, en coton double retord, avec son fitting marqué, son col club et ses petits poignets, affiche un côté couture, très élégant, très 50’s, très Mad Men (à partir de 109€).

© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker

Tombés sous le charme de la très jolie histoire de la Rose Noire, mais aussi de la qualité impeccable des modèles de chemise signés Seidensticker, c’est à notre tour de vous les faire découvrir en vous invitant cette semaine, à tenter votre chance pour gagner le  modèle de votre choix parmi toutes les collections Seidensticker! Pour remporter ce nouveau jeu concours, rien de plus simple, il suffit de suivre les indications ci-dessous.

© Les Garçons aux Foulards - Seidensticker

Répondez par email à l’adresse lesgarconsauxfoulards@gmail.com aux 4 questions posées :

Questions

-       En quelle année Walter Seidensticker a-t-il fondé la marque du même nom?

-       Quelle est l’adresse parisienne de la nouvelle boutique Seidensticker ?

-       Pour ne pas avoir à repasser ses chemises Seidensticker, vaut-il mieux les mettre à essorer à: 400, 600, 800 ou 1200 tours?

-       Enfin, question subsidiaire, plus créative, de quel univers de la marque, Uno Super Slim, Rose Noire ou Rose Noire Tailored vous sentez-vous le plus attiré ?

En attendant le plaisir de découvrir vos réponses, et le tirage au sort qui aura lieu à la fin du mois et qui désignera le gagnant de ce nouveau jeu concours, nous vous souhaitons à toutes et à tous bonne chance !!!! ;-)

A.





vendredi 7 février 2014

Cartier. Le style et l’histoire



© Les Garçons aux Foulards - Diadème Soleil, Cartier, 1907
« Encore une exposition de marque dans un espace culturel ? » allez vous protester en voyant ce titre. C’est un peu, il est vrai, la tendance muséographique du moment, qui laisserait à penser que plus une seule exposition n’est capable d’attirer du monde sans avoir estampillée le label « mode » ou « créateur ». Et c’est d’ailleurs avec cet a priori que nous sommes allés découvrir (enfin) la rétrospective Cartier au Grand Palais. A priori que, nous devons avoué, a disparu dès la première salle franchit. Car même si l’exposition met bien évidemment en scène la marque en tant que référence de l’univers de la joaillerie parisienne, elle n’a pas le mauvais goût de tomber dans l’écueil purement  commercial que nous aurions pu attendre d’un tel événement, et se focalise sur le savoir faire incroyable de la maison, son histoire et l’évolution de son style au fil des décennies et des commandes passées par ses plus illustres client(e)s. Histoire complexe et riche finalement peu connue, éclipsée peut-être par la célébrité du nom, gravé en lettre d’or sur les devantures des plus belles avenues du monde et par l’éclat des diamants qui ici se dévoilent par milliers.
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, le Style et l'Histoire 

Par milliers, et encore, j’ai peur que le chiffre soit approximatif dans cette exposition aux dimensions colossales ou tous les superlatifs sont permis. Colossale par le lieu au cœur du Salon d’Honneur qui a rouvert au public il y a peu, colossale par la mise en scène féerique qui recouvre les plafonds de l’immense salon d’un jeu de lumières et d’images projetées, sans cesse en mouvement et changeantes, mais aussi colossale par son aspect muséographique. Pas moins de 600 objets présentés (bijoux, joaillerie, montres, pendules ou encore objets usuels et décoratifs), parfois accompagnés pertinemment de témoins de la vie artistique et des goûts de leur temps : vêtements, accessoires, mobilier, tableaux, photos, gravures, et revues de mode.  Près de 200 dessins préparatoires, de nombreux documents d’archives (dont des cahiers d’idées, des photos, des plâtres), achèvent d’illustrer les coulisses de la création et nous font pénétrer un peu plus dans l’univers créatif de l’une des plus prestigieuses maisons de l’histoire des arts décoratifs et de la joaillerie du XXème siècle.
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, le Style et l'Histoire 

© Les Garçons aux Foulards - Cartier, le Style et l'Histoire 
© Les Garçons aux Foulards - Cartier 
© Les Garçons aux Foulards 
© Les Garçons aux Foulards 
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, le Style et l'Histoire 
La réputation de la maison Cartier, développé par Louis-François Cartier au milieu du 19ème siècle, devenu dès le Second Empire "joaillier des rois", n’est pas à mettre en doute. Dès la première salle, surprises et émerveillement sont au rendez-vous. Du célèbre saphir bleu de près de 500 carats, d’origine sri-lankaise, (l’un des plus gros taillés jamais répertoriés) acheté en 1921 par la Reine Marie de Roumanie, à la vitrine renfermant une exceptionnelle collection de diadèmes en diamants taillés, virtuosités suprêmes des ateliers et signes des orgueils élevés d’une clientèle titrée, ayant coiffés  quelques unes des figures historiques les plus importantes du début du siècle dernier,  la magie opère et nous sommes transporté quasi immédiatement dans un univers onirique dans lequel nous nous laissons guider avec délice.
© Les Garçons aux Foulards - Portrait de la Reine Marie de Roumanie
© Les Garçons aux Foulards - Saphir bleu de Marie de Roumanie

© Les Garçons aux Foulards - Cartier 

© Les Garçons aux Foulards - Cartier 

Style dit "guirlande" à la fin du 19ème siècle, au nom des plus imagés, et dont la richesse des parures fait écho à la récente découverte à cette époque des mines de diamants d’Afrique du Sud, qui fit la renommée du joailler récemment installé 13, rue de la Paix. Travaillant quelques fois en collaboration avec le couturier Worth, la production du successeur, Louis Cartier, fera référence au néoclassicisme du XVIIIe, s’interdisant de se laisser distraire par les avant-gardes, l’art nouveau ou le style rocaille.
Évolution du style et de l’époque, à l’occasion de l’exposition de 1925 des Arts Décoratifs, Cartier expose 150 objets dits "modernes", bijoux, accessoires et pièces d’horlogerie, au Pavillon de l’élégance, où sont présentes les maisons de couture Callot, Jenny, Worth et Lanvin. Le noir et le blanc, gage d’élégance, devient l’une des principales tendances du bijou Art déco.
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, le Style et l'Histoire 
© Les Garçons aux Foulards - Ornement de tête, Cartier, 1923
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, le Style et l'Histoire
© Les Garçons aux Foulards - l'Oiseau de Feu, 1910
Pourtant, l’engouement pour un certain exotisme se développe en parallèle de cela. Véhiculé notamment par les créations des ballets russes de Serge Diaghilev dont les Schéhérazade, Oiseau de Feu ou encore Spectre de la Rose révolutionnent l’art de la danse et marquent leur époque, la force des couleurs contraste avec la sobriété de l’Art Déco et  les motifs, réels ou fantasmés, en provenance d’Égypte, d’Inde, et d’Extrême-Orient influenceront fortement la joaillerie comme ils influenceront la mode.
© Les Garçons aux Foulards - l'Oiseau de Feu, 1910
Coiffe d'Ida Rubinstein dans Schéhérazade, 1910
© Les Garçons aux Foulards - Diadème "Bérénice", Cartier, 1910 
© Les Garçons aux Foulards - Cartier
© Les Garçons aux Foulards - Cartier

Joailler des rois et Rois des Joailler, la maison ne manque pas à sa réputation lorsque Bhupindra Singh, Maharadja de Patiala, apporte chez Cartier en 1925, plusieurs dizaines de milliers de pierres à sertir de façon nouvelle, en respectant les formes traditionnelles indiennes tout en intégrant les tendances Art déco, défi extraordinaire pour les ateliers parisiens. De cette commande hors normes et tout à fait inédite, la pièce maîtresse sera la plus somptueuse parure de l’histoire de la joaillerie : 2930 diamants, 2 rubis, et en son centre le diamant De Beers, un diamant jaune de 234,65 carats, le 7e plus gros du monde. Exposé, le collier, qui avait été bien endommagé, a été reconstitué, parfois avec l’aide de quelques pierres de synthèse. Epoustouflant.
© Les Garçons aux Foulards - Parure du Maharadjah de Patiala, Cartier, 1925
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, le Style et l'Histoire 

Autre découverte merveilleuse de cette exposition, Les pendules mystérieuses, inspirées à Cartier par une invention de l’illusionniste Robert-Houdin reprise par l’horloger Maurice Couët, qui sont devenues l’une des créations les plus emblématiques de la maison. Au départ, chacune d’entre elles nécessite presque une année de minutie pour aboutir à une pièce d’art et de joaillerie dont les aiguilles indiquent le temps et donnent l’illusion parfaite de n’être reliées à aucun rouage. Une centaine seront faites de 1912 à 1930. On ignora longtemps que chacune des aiguilles est solidaire de son propre disque de cristal tournant, relié à une crémaillère dissimulée dans le cadre. Elles nous fascinent à l’heure actuelle toujours autant.
Evolution du siècle, évolution de notre époque, les têtes couronnées européennes fidèles à la maison Cartier, laissent petit à petit place aux célébrités du monde du cinéma ou aux riches héritières américaines qui furent parmi les clientes les plus assidues de l’antennes new-Yorkaise de la maison et participèrent à son succès planétaire que nous connaissons. De Wallis Simpson (1896-1986), duchesse de Windsor, qui aimait l’esprit des bijoux fantaisie avec ses couleurs vives, et pour qui fut réalisé le premier bijou panthère en 3 dimensions à l’actrice Elizabeth Taylor (1932-2011), qui porta entre autres pierres, le Burton-Taylor (69,42 carats), en passant par la Princesse Grace de Monaco, qui appréciait les oiseaux, les caniches et les animaux de (basse-)cour pour leur aspect sans doute moins formel, l’exposition se termine par  l’extravagante actrice Maria Félix (1914-2002) célèbre pour son adoration des serpents et crocodiles en bijoux et dont quelques unes des commandes réalisées par Cartier sont exposées et nous fascinent de leur exceptionnel savoir faire.
© Les Garçons aux Foulards - Collier draperie, Cartier, 1947 - Exécuté pour la duchesse de Windsor
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, Modèle dessiné pour Elizabeth Taylor 
© Les Garçons aux Foulards - Cartier, Collier serpent dessiné pour Maria Félix
"Cartier. Le style et l’histoire", exposition conçue comme une lecture de l’histoire du bijou, au travers des créations du joaillier, veut nous montrer les évolutions que connurent les usages et les styles durant plus d’un siècle de création. Mais bien plus que l’aspect purement pédagogique ou artistique de celle-ci, ce qui en découle également pour le visiteur incrédule face aux cascades de diamants, aux milliers de carats, c’est sans doute l’admiration d’un savoir faire inouï, l’éblouissement face à la somptuosité des pièces exposées, la prise de conscience également avec une certaine tristesse de la disparition d’un certain art de vivre, ou toute activité étaient traitées comme un art et ou tout objet pouvaient devenir objet d’art. Cartier a ainsi joué un rôle  important dans l’histoire des arts décoratifs, ses créations, du classicisme du « joaillier des rois » aux inventions radicales du style moderne, entre géométrie et exotisme, offrent un témoignage passionnant sur l’évolution du goût et des codes sociaux. Joaillerie, horlogerie, objets aussi pratiques que raffinés : Cartier a séduit les personnalités les plus élégantes du XXe siècle.

A.

Cartier - Le style et l’histoire
Jusqu’au 16 février 2014 au Grand Palais.
Ouvert tlj de 10 à 20h, nocturne le mercredi soir jusqu’à 22h. Fermé le mardi.